La Rue Adjaçente

Le ciel était toujours obscur dans ce monde, à moins que ce n'était que le coeur du jeune homme qui marchait près de là qui lui donnait cette impression de noirceur permanente. Il y avait pourtant des signes qui ne trompaient pas, sa peau ne se désintégrait pas, cela signifiait que la nuit était bel et bien arrivée. Depuis une bonne cinquantaine d'années, le vampire ne faisait plus attention à grand chose, il s'était brûlé à maintes reprises parce qu'il était resté dehors trop longtemps, perdu dans ses pensées. Il n'était pas suicidaire, mais longtemps il avait pensé mettre fin à cet éternité dont il n'appartenait pas. Pourtant, une petite voix en lui lui intimait que ce n'était pas la voie à choisir. De plus, il y avait toujours cette crainte qui planait en lui; s'il s'enlevait la vie (Ou plutôt la non-vie dont il était gratifié), il savait qu'il manquerait quelque chose sur la Terre ou encore que l'âme d'October le maudisse pour ses actes.

Toujours vêtu de vêtements de couleur sombre, il ne se faisait presque pas remarquer. La seule chose qui trahissait sa présence était sa chevelure d'un blanc nâcré dont les mèches rebelles lui balayaient le visage. Il les repoussa du revers de la main, ce qui n'arrangea pas grand chose, puis continua sa balade nocturne. Damian Frost, car tel était son nom, n'aimait pas particulièrement la compagnie de ses semblables, ni celle des autres races, d'ailleurs. Il préférait rester seul. Étais-ce par peur de devoir imposer son chagrin, ou alors par crainte de commettre à nouveau des actes semblables? Il n'en savait trop rien. Lorsqu'il vit l'horloge illuminée afficher les heures, il s'arrêta, histoire de contempler la douce lumière qui émanait du disque d'ivoire. Puis, lassé de lever les yeux aux ciel, il repéra le trottoir et décida de s'y asseoir. Il descendit la fermeture éclair de son manteau noir et y sortit une fiole de verre remplie d'un liquide écarlate. Il ouvrit le récipient et avala d'une longue traite le liquide épais. Certes, il préférait le sang frais et encore chaud, mais depuis ce terrible soir où il tua sa fiancée pour se repaître de son sang, il ne voulait plus enlever la vie à des humains par plaisir. Il ne tuait que par nécessité, vidait le corps de sa victime pour remplir des centaines de fioles qu'il buvait lorsqu'il en avait vraiment besoin. À chaque fois qu'il passait à l'acte, il imaginait sa victime père de famille ou alors promise à quelqu'un et à chaque fois ça le torturait.

Lorsque la fiole fut vidée, il la jeta dans la rue et en prit une seconde à laquelle il réserva le même sort que la précédente. Puis, il passa son bras sur ses lèvres pour les débarrasser de toutes traces de sang. Ce qui le dégoutait vraiment en ce monde, c'était ces vampires brutaux et sadiques qui s'amusaient à torturer leur victime ou à tuer par pur plaisir. Ils n'avaient pas connu l'amère tristesse d'avoir tuer un être cher, ou peut-être étais-ce lui qui était trop près de ses sentiments. Ce n'était pas coutume chez les vampires de ressentir encore des sentiments puisque leurs organes sont morts et atrophiés, mais Damian se souvenait toujours des sentiments humains, il les avait toujours en tête. Les sentiments revenaient le hanter pour lui rappeller à chaque fois qu'il ouvrait ou fermait les yeux, qu'il avait tué la femme qu'il aimait le plus en ce monde. Le jeune vampire était hanté par la même chanson tous les soirs, celle qui le harçelait, le rendait fou... Elle résonnait encore dans sa tête et il ne put s'empêcher de la murmurer...

[À toi Melisandre...]

[Et c'est parti! ]

Encore une nuit noire et obscure. Le soleil ne semblait jamais vouloir montrer le bout de son nez. Une atmosphère et un climat tout à fait déprimant. Enfin, le soleil, on pouvait encore l'attendre longtemps, étant donné que la nuit était tombée. Seulement, il était difficile de vraiment savoir quand le sombre jour avait laissé sa place aux ténèbres nocturnes. Peut-être y avait-il eu une faible diminution de la luminosité. Peut-être...

Pourtant, une flamme rouge perçait l'obscurité, comme un fier oriflamme, orgeilleux et fier de sa différence. Cette silhouette ardente n'était autre que celle d'une femme rousse, aux courbes voluptueuses et à la démarche pleine d'arrogance féline. La femme portait une robe d'un rouge écarlate, impudiquement fendue de chaque coté de ses longues jambes, les dévoilant ainsi à la vue du premier venu. Un spectacle de choix... de même que son profond décolleté. Cette robe n'était que pure provocation. Se promener seule, accoutrée ainsi et de nuit... Cela ne pouvait être que de la provocation... ou de la sottise?

Sauf que Mélisandre était tout sauf stupide. Rusée et manipulatrice, fou serait celui ou celle qui tenterait quoique ce soit contre elle. L'éclat de son regard émeraude trahissait son appartenance aux hors-la-loi. Et si elle était un peu plus posée que la moyenne, mieux valait ne pas l'énerver au risque de se retrouver avec des griffes dans l'abdomen. Ses doigts fins et délicats étaient ornés de bagues, plus ou moins grosses. Toutes contenaient du poison, extraits pour la plupart du venin des serpents qu'elle affectionnait tant...

L'horloge se dressa subitement devant elle et mélsandre cessa de marcher, regardant le cadran illuminé. Il n'était pas très tard encore... Elle avait tout le temps de rentrer. Son ouie surdéveloppée capta alors l'écho lointain d'une chanson. Intriguée, elle chercha l'origine de la mélodie. Malgré les hauts talons de ses cuissardes rouges, elle avançait sans un bruit. Dangereusement silencieuse.

Alors elle le vit, silhouette recroquevillée, aux cheveux neigeux. C'était cet homme qui chantait ainsi. Quoiqu'homme ne soit pas vraiment le terme adéquat. L'odorat de l'hll lui indiqua l'inconnu comme étant un vampire. Aussitôt, elle se mit sur la défensive. Ce n'était peut-être pas une bonne idée d'approcher... Et pourtant... La mélodie lancinante l'intriguait. Elle était poignante... A moins que ce ne soit la mélancolie du vampire qui l'attire ainsi?

Quoiqu'il en soit, la jolie rousse s'approcha. Après tout, elle savait se défendre. Elle s'arrêta devant lui, mais à distance respectable. Autant ne pas lui donner l'impression de vouloir l'agresser. Ainsi placée, le vampire verrait une paire de cuissarde moulant des jambes au galbe parfait. Puis, il remonterait sur les hanches, le ventre, les seins et enfin le beau visage de mélisandre. Visage qui s'était fait moqueur à l'aide d'un petit sourire en coin. La jeune femme semblait toujours froide au premier abord. Elle décida d'interrompre le chant de sa jolie voix musicale et légèrement grave :

- "Jolie chanson... Quel en est le titre? Je ne crois pas la connaître..."

Elle avait posé les poings sur ses hanches et dévisageait l'inconnu de ses yeux de félin. Des yeux aux pupilles dilatées par la nuit, mais oblongues le jour. Des yeux à la couleur verte iridescente. Comme les félins, ses yeux semblaient illuminés dans l'obscurité.

Le jeune vampire était absorbé par cette chanson lanscinante qui ne cessait de se répéter dans sa tête... Il se sentait encore plus mélancolique qu'à l'ordinaire, il couvrit son visage avec ses mains, pour cacher les quelques larmes qui déboulaient sur son visage d'albâtre. Puis, il entendit une voix retentir devant lui, c'était une voix de femme. Il cessa de chanter, essaya d'essuyer ses larmes de façon subtile et posa son regard argenté sur la première chose qu'il vit: les jambes gainées de la jeune femme. Il remonta son regard, essayant de contourner les courbes qui s'offraient à ses yeux et porta toute son attention sur le visage de son interlocutrice... Elle était belle, très belle, mais le vampire se sentait trop désarçonné pour apprécier toute l'ampleur de la beauté de la jeune femme. Il pouvait dire, parcontre, qu'elle se faisait beaucoup remarquer, par la couleur de ses habits entre autre, qui étaient d'un rouge criard. Elle lui demanda quel était le titre de la chanson qu'il chantonnait... Le titre? Lui même l'ignorait, cette chanson s'était imposée à son âme comme on impose aux esclaves les sales besognes. Elle s'était attachée à son esprit dès lors qu'il avait vu le sang d'October ruisseler.

-«Eumh...À vrai dire je n'en connais pas le titre...»

On décelait aisément la gêne et l'embarras dans la voix du vampire, ses mains tressaillirent. Il n'était pas du genre très bavard et, à vrai dire, il n'était pas non plus très sociable. Le vampire ressera son manteau sur ses épaules et baissa son regard.

[Dsl j'ai la flemme ]

Il ne savait que faire, dérangé par la présence de cette femme inconnue... D'habitude, lorsque les gens le croisaient, ils ne faisaient pas attention à lui, ou encore ne faisait que le regarder quelques instants avant de se désinteresser. Parcontre, son interlocutrice semblait entêtée à rester à ses côtés. Alors soit, il ferait avec. Il leva ses yeux vers elle et lui lança un sourire forcé en signe de salutation. Ce n'était pas qu'elle l'intimidait, mais il n'était pas d'un naturel sociable et préférait la compagnie de la lune à celle des êtres doués de conscience et de parole. Apparement, elle n'était pas du genre timide, c'était évident, à en juger par sa tenue flamboyante et extravaguante et par son expression de confiance.

Le vampire n'était pas dans le même bateau. Mais, lorsqu'elle fit entendre sa voix une seconde fois, il ne put s'empêcher d'afficher un léger sourire amusé. Timide? Le terme n'était pas exact, il était solitaire, certes, mais pas timide. Bien entendu, c'était toujours la première impression qu'il dégageait. Il ne répondit pas à cette question indirecte et descendit de nouveau la fermeture éclair de son manteau, cette fois-ci pour y prendre un paquet de cigarettes. Il en alluma une et tendit le paquet à son interlocutrice. Alors si elle avait l'intention de rester, aussi bien de lui faire passer du temps en agréable compagnie. Et puis ça le ferait oublier l'espace d'un temps tous ses regrets. Il tira une profonde bouffée du bâtonnet et la relâcha dans la nuit noire.

-«Damian Frost...Vous êtes?»

C'étaient bien les répliques de Damian, courtes et directes. Il n'était pas du genre à parler pour ne rien dire, préférant user de la parole quand c'était vraiment nécessaire...

La vampire n'était pas une de ces personnes esclaves de la nicotine, surtout que son cerveau de vampire lui refusait toute dépendance outre l'hémoglobine. Il inspira une seconde fois cette fumée infecte qui lui aurait brûlé la gorge s'il aurait été encore humain, mais maintenant, tous les luxes qu'il s'était refusé par peur de réduire son espérance de vie, ils se les permettait sans retenue. Les deux tisons répandaient leur douce lumière dans la nuit, elle partageait le rôle d'éclaireur avec la lune. Lorsque la jeune femme prit une cigarette, il ressera son paquet et lui tendit un briquet. Puis, elle lui adressa une réplique qui eut pour effet de le faire rire un peu, un rire qui se voulait grave et presque imperceptible. Il aimait l'ironie et l'humoir qui se disait de style anglais... Il passa une main dans ses cheveux de neige et posa son regard d'acier sur la belle. Il osa enfin la détailler un peu plus...un splendide visage, qui lui rappellait étrangement les chaudes nuits d'été, ou encore les aurores qu'il avait à peine le temps d'admirer. Ce soir, elle était un soleil parmi la nuit, comme une fleur qui s'épanouit dans les ténèbres. Sa tenue, bien que trop attichante au goût de Damian, était elle aussi très flamboyante et semblait de la même couleur que sa chevelure bouclée.

Puis, elle lui révéla son nom et son statut...Mélisandre Valerian, joli nom. Il inspirait à Damian la douceur et la force à la fois, des caractéristiques très trompeuses et dans de tels pièges personne ne devait tomber...Ainsi donc elle était médecin à l'Eden. Damian ne connaissait pas beaucoup cette organisation, il la connaissait plus de réputation plutôt que d'expérience personnelle. Puis, gentleman (ouais bah à sa façon), il baissa légèrement la tête en signe de courbette polie. Généralement, lorsque les présentations étaient faites, le vampire avait du mal à alimenter la conversation, il se trouvait face à un malaise. De toute façon, il sentait la faim grandissante lui poindre l'estomac et faire tourner sa tête, cette alerte caractéristique qui lui indiquait qu'il devait ingérer une dose de sang supplémentaire pour repaître sa famine. Ne sachant trop si la jeune femme serait appeurée par son état, il hésita longuement avant de plonger la main dans son manteau pour y trouver le doux réconfort d'une fiole de sang entre ses doigts. Il la dévissa de façon désinvolte et ingurgita son contenu en un rien de temps. Il s'essuya la bouche et esquissa un léger «désolé...» significatif de son trouble d'avoir ainsi agi devant une gente dame. Mais les besoins étaient ce qu'ils étaient et s'il ne s'abreuvait pas, il risquait bien vite de faire face à la Bête...

-«Alors que fait un médecin dans une rue sombre à une heure si tardive? Vous n'avez pas peur des dangereux prédateurs?»

Bien entendu, Damian ne se considérait pas comme un prédateur. Il était, selon ses dires, innofensif. Évidemment, quand il manquait de sang dans ses réserves, il était bien forcé de jouer la mort pour y trouver son compte. Mais, c'était toujours une chose qu'il considérait comme une sale besogne. Contrairement aux autres vampires, il n'aimait pas voir la vie quitter les yeux de sa victime, il essayait de tuer des gens solitaires ou suicidaires, pour éviter de briser des familles ou des couples. C'était un peu comme un bon samaritain vampire, à certaines limites...

La cigarette toujours à la main, il exhala la dernière lampée de fumée juste avant de l'écraser sous ses talons et de la jeter plus loin. Puis, il reporta son attention sur Mélisandre qui souriait toujours. Apparement, cette rencontre l'amusait beaucoup. Damian, lui, ne trouvait pas cela particulièrement amusant, bien qu'il ne trouvait pas grand chose amusant...Il s'avéra que la jeune médecin aimait les répliques ponctuées de malice, malice que Damian n'eut aucun mal à deçeler lorsqu'elle répondit enfin à ses questions. Alors elle se baladait...d'accord c'était une réponse plausible. Parcontre, rare étaient les gens qui aimaient se promener à la male heure. Puis, elle mentionna ses dures journées de travail et le nombre fulgurant de gens blessés...Les vampires y étaient évidemment pour quelque chose. Elle eut un rire qui eut pour effet de réveiller les sens du jeune homme, un rire comme ils les aimait qui lui rappellait les rires d'October. Pourtant, même si ça lui rappellait sa flamme perdue, il ne pouvait s'empêcher de les déguster comme des moments uniques de la vie. Il eut un sourire sincère et doucereux.

Puis, toujours pour garder le mystère, elle leva sa main et des lames en sortirent...Une Hll apparement. Damian ne fréquentait pas beaucoup les gens de cette race, il n'avait pas peur d'eux, certes, car il était lui aussi doté d'une force surprenante et de puissants atouts dus à sa race, mais il préférait simplement ne pas être mêlé à leurs activités. Il n'était pas impressionné et son visage restait impassible devant les griffes lacérantes. Puis, aussi rapidement qu'elles étaient apparues, les lames se rétractèrent doucement. Ensuite, elle lui posa trois questions qui eurent pour effet de faire rire le vampire. C'était, certes, très étrange de voir un vampire se promener avec des fioles de sang au lieu d'attaquer de pauvres humains, un vampire mélancolique était également très spécial. Elle lui avait également demandé s'il était un nouveau vampire...Il avait maintenant un sourire amusé.

-«Vous êtes très curieuse...»

Il avait décidé de s'amuser un peu lui aussi, faisant planer le mystère autour de cette question avant de répondre avec un sourire narquois:

-«Pour ce qui est de broyer du noir, sachez que je suis simplement de nature...mélancolique. Ensuite pour la question des fioles de sang, c'est que je préfère ce mode d'alimentation à ceux des autres vampires que je considère comme primitifs...Enchaînons avec mon âge, je ne suis pas un nouveau vampire...Je suis ce qu'on appelle un novice, assez vieux pour commettre l'Etreinte, mais assez jeune pour garder cette apparence...»

Après cela, il redoutait qu'elle le prenne pour un prétencieux avide de beauté et de jeunesse éternelle. Mais, il ne voulait pas raconter son histoire et c'était toujours de cette manière qu'il évitait les questions trop indiscrètes.

Les yeux du vampire suivait alternativement les mouvements de Mélisandre et il écoutait attentivement ce qu'elle avait à dire. Elle avait la parole facile à en juger par sa capacité à répondre de façon plutôt abstraite, mains néanmoins très distrayante. Sa façon de répondre aux questions du vampire le rendait d'autant plus silencieuxet même un peu mal à l'aise, mais il s'efforçait de garder le contrôle sur la tournure des choses. Elle parla de sa curiosité qu'elle considérait à la fois comme un défaut et une qualité...C'était évidemment une question de dosage, comme elle le mentionnait et c'était plutôt paradoxal. Mais dans ce monde, tout était relatif, même la personnalité. La jeune femme était apparement d'humeur joueuse, mais Damian se sentait enclin à entrer dans son jeu, histoire de voir ce que lui réservait cette soirée riche en surprises. Il resta immobile et stoïque, même lorsqu'elle lui demanda son point de vue face à sa curiosité. Il ne fit qu'hausser les épaules de façon désinvolte. Puis, elle le qualifia de vampire raffiné. Si errer dans les rues était raffiné, alors il se plaisait bien à ce qualificatif. Mais, Damian sentait bien qu'elle avait conscience de son état.

Il l'écoutait toujours parler, absorbé par le regard magnétique de la gente dame. Oui, c'était certes difficile de subir un tel changement, mais ce n'était pas le plus difficile. Le plus dur à supporter était de toujours avoir en mémoire les sentiments humains et les ressentir, de revoir les visages de tous ceux qu'on tuait, y compris les gens qui nous tiennent le plus à coeur. Si au moins il aurait été privé de toutes ces émotions humaines, il serait bien mieux aujourd'hui. Elle, ne pouvait pas comprendre puisqu'elle était née dans cet état, comme elle venait de le mentionner. Puis, elle lui expliqua ce qu'adviendrait de sa race si elle serait mordue par un vampire. Oui, de devoir chasser la race à laquelle on appartenait est insupportable. Damian le savait et connaissait trop bien cette sensation étrange. Il aquiesça de façon tacite, mais il se doutait que la Hll avait bien compris. Il se demandait toujours pourquoi elle était toujours devant lui...d'habitude, les gens se désintéressaient rapidement de son cas, voyant qu'il n'y avait rien à faire avec lui. Peut-être était elle plus préoccupée par lui que les autres avec qui il avait eut des rencontres. Il se dit que si elle devait rester à ces côtés, autant faire sa part dans cette conversation...

-«Alors, qu'elle est la perception des Hll face aux vampires?»

Le vampire sourit. Il aimait poser des questions difficiles à répondre, auxquelles ont devait réfléchir intensément. Pour sa part, il préférait largement répondre à des questions lourdes. Il observa les moindres mouvements de la Hll tout en écoutant d'une oreille attentive tout ce qu'elle avait à dire. Sa perception de la chose était très interessante, Damian ne connaissait pas très bien les Hll, mais il aimait pouvoir en apprendre plus sur leurs sentiments, leurs forces et faiblesses. Mais, à force qu'elle lui expliquait son point de vue, il y déçela quelques contradictions. Comme par exemple le fait que les humains étaient leurs principaux ennemis, mais également des êtres inférieurs. Le vampire continuait toujours de l'écouter, surtout lorsqu'elle parla de l'Étreinte. Certes, personne ne gagnait à être vampirisé, mais elle croyait que les humains, eux, gagnaient en force. Puis, lorsqu'elle eut terminé de parler et qu'elle lui posa à son tour une question, il resta silencieux pendant de longues minutes avant de répondre d'une voix grave:

-«Les humains sont pour moi tout ce que je représentait avant. Je suis né humain, j'ai aimé mes semblables. L'Étreinte a été pour moi la mort de mon ancienne vie...C'est très relatif en fait. Le vampirisme n'est pas nécessairement un changement d'identité, c'est le passage de la vie à une non-vie...Mes organes se sont nécrosés, mon coeur ne peut plus ressentir, les odeurs sont imperceptibles et les saveurs insipides. Ce qui fait ma malédiction...c'est ma mémoire. Car, malgré tous ces changements, la mémoire reste et ce n'est qu'un pâle reflet des sentiments que nous ressentons, mais, lorsqu'on a commis des actes terribles et qu'on se considère toujours comme un humain, le poids de nos pêchés nous pèse sur les épaules, et ce, pour l'éternité durant...»

Il inspira profondément, même si l'air lui était inutile. Il avait gardé cette habitude de respirer. Il ressortit son parquet de cigarettes et en grilla une seconde. Il avala une première bouffée qu'il laissa tourner dans ses poumons. Son regard s'était posé, un bref instant, sur les cuisses de son interlocutrice...Il reporta son attention sur la Hll, extirpant la fumée de ses organes inertes.

-«Les humains sont pour moi plus importants que pour la plupart des vampires. Les autres de ma race les considèrent comme de la simple nourriture, des êtres inférieurs qu'il faut absolument exterminer. Mais, d'un tout autre ordre d'idées, ils ne veulent pas causer leur fin, car, si les humains n'existent plus, les vampires seront éteints également. C'est assez ironique, je l'entends. Moi, je préfère les tuer lorsque c'est absolument nécessaire, j'extrais tout le sang possible que j'entrepose dans ces fioles et ainsi, je tue moins de pauvres innocents...»

Tirant une autre bouffée, il la tendit à la médecin...

-«Pourquoi en voulez vous autant aux humains? Pourquoi cette organisation...l'ADH veut-elle la mort des humains et... que fait l'Eden?»

Damian ne suivait pas beaucoup toutes ces rivalités, il était en quelque sorte emprisonné dans sa propre conscience, esclave de son état. Alors, il ne se préoccupait pas trop des autres races ou de leurs histoires. Il avait observé les moindres expressions de son interlocutrice, tout en tentant de comprendre l'essentiel de ce qu'elle lui racontait. Damné, ça, il le savait. Il continua à l'écouter, lui vouant une attention sans bornes. Il voulait comprendre ce qui se passait dans son monde, même si cela ne le concernait pas vraiment. Ce qu'il ferait avec ces informations? Rien sans doute. Simple culture personelle. Il exhala une autre lampée de fumée qu'il extirpa aussitôt. Mélisandre lui expliqua pourquoi l'ADH avait été créée, ses motifs et ses actes et pourquoi elle faisait partie de l'Eden. Damian n'y comprennait rien aux clans et aux castes. C'était certes, un bon moyen de s'allier et donc d'être plus forts, mais lui, n'en voyait pas l'utilité, du moins, dans son cas. Il n'avait rien contre les humains, tout comme il n'avait rien contre les autres races. Les humains tentaient d'exterminer sa race depuis des siècles, mais cela, il ne s'en formalisait pas. Lorsqu'elle eut terminé ses explications, il prit la parole:

-«Je comprends pourquoi ces organisations ont été créées, mais, exterminer tous les humains ne servira à rien. Les plus cupides et les plus dangereux méritent d'être tués, mais les gens innocents qui souhaitent la paix ne méritent pas une mort si injustement trouvée. Pour ce qui est du monde dans lequel j'évolue, je ne le connais pas plus qu'un autre. Je ne m'interesse pas vraiment à ces conflits. De plus, j'ai perdu un peu la notion des choses et du temps, c'est donc difficile de suivre les évênements marquants...»

Il tira une autre bouffée de cigarette et, lorsqu'il la recracha, des petits ronds de fumées se formèrent autour de lui, figures qu'il ne se gêna pas d'observer jusqu'à ce qu'elles disparaissent graduellement.

-« Je comprends votre choix d'avoir intégrer l'Eden. Je suppose que si j'aurais admis mon aversion envers ce groupe que je serais déjà transperçé par vos griffes...Quoiqu'il en soit, l'avenir de ce monde m'importe peu.»

On voyait aisément que le vampire n'était pas maître de son destin et qu'il se laissait plutôt dominer par lui.

-«Vous avez déjà tué?»

Amusée, Mélisandre haussa un sourcil quand Damian lâcha qu'elle l'aurait transperçé de ses griffes s'il avait avoué son aversion pour l'Eden.

- "Vous transperçer? Non, je ne suis pas si intolérante. Chacun a le droit d'avoir ses opinions, même si elles sont contraires aux miennes."

Elle haussa les épaules, avant de reprendre la parole d'une voix plus douce :

- "L'avenir de ce monde ne vous préoccupe pas? Vraiment? Mais l'avenir d'Adhénor est votre avenir Damian. Comment pouvez-vous ne pas vous sentir concerné? Etes-vous donc si mélancolique que ce qui peut vous arriver vous importe si peu?"

Le visage de la sulfureuse hll se ferma quand le vampire lui demanda si elle avait déjà tué.

- "Oui, évidemment."

Un sourire sans joie fleurit sur son visage :

- "Etrange paradoxe non? En tant que médecin, je m'efforçe de sauver des vies. Mais lorsque je quitte l'hopital, je suis autant capable que quelqu'un d'autre de l'ôter. Mais ceux que j'ai tué l'avaient mérité. Du moins, de mon point de vue."

Elle sourit à Damian.

- "Et vous Damian? Aviez-vous déjà tué avant de devenir vampire?"

Le vampire trouvait cette conversation très anormale. Il n'avait jamais essayé de connaître une personne autant qu'il était en train de le faire avec Mélisandre. Mais, elle avait quelque chose qui mettait le jeune vampire en confiance, quelque chose qui l'incitait à réfléchir profondément aux questions philosophiques de cette étrange vie. S'il se préoccupait de l'avenir d'Adhénor? Cette question était plutôt dénuée de sens pour le jeune homme. Il avait une opinion partagée; il se fichait éperduement de l'impact de la menace humaine sur ce monde, mais s'il venait à disparaître, tous ce pourquoi le vampire avait vécu serait anéanti. Il y réfléchit quelques secondes avant de répondre d'une voix grave:

-«Je ne crois pas qu'Adhénor soit réellement menacée par les humains ou quoique ce soit d'autre d'ailleurs, je trouve que l'ADH fait un très bon travail pour les exterminer tous...»

On pouvait aisément percevoir l'ironie de cette phrase, il était clair qu'il désaprouvait les actes de ce clan.

-«Je dois néanmoins avouer que si elle venait à disparaître, tout ce pourquoi j'ai vécu serait d'un coup détruit...L'Avenir d'Adhénor m'importe, mais peut-être moins que la plupart des gens.»

Il planta son regard hivernal dans celui de la jolie Mélisandre. Elle lui avait mentionné qu'elle avait déjà tué et qu'elle trouvait cela purement légitime. Il comprenait cela...Il avait également tué sans remords, mais à chaque fois que ses mains étaient souillées de sang, il se rappelait cette nuit qui éveilla en lui tous ces sentiments, du moins le souvenir de ces sentiments. Il revoyait le visage d'October, déformé par l'hémoglobine et il voyait les deux orifices qui regorgeaient de sang frais. Puis, elle lui posa une question qui eut pour effet de le faire frémir. Il lâcha sa cigarette qui alla rouler sous la cuissarde droite de la jeune médecin et son regard se ternit...

-«Oui, j'ai déjà tué...»


[Flemme.... ]

Le vampire était absobé par l'environnement qui l'entourait et il voyait les grandes aiguilles de l'horloge tournoyer doucement sur la lunette d'ivoire. Cela faisait maintenant une heure qu'il parlait avec la jeune médecin, mais, étrangement, il ne s'ennuyait pas du tout. La conversation avait été rapidement alimentée par la flamboyante rousse qui ne manquait pas de répliques. Puis, lorsqu'elle soupira et qu'elle lui intima qu'il avait de l'adresse pour entretenir le suspens, il se tourna vers elle avec un sourire amusé. Il ne le faisait pourtant pas exprès, mais il était effectivement très mystérieux. Puis, elle lui demanda s'il appartenait à un clan...

-«Non, ancun clan.»

Le vampire savait très bien que n'appartenir à aucun clan sur Adhénor était très important. Mais, il n'avait toujours pas trouvé son idéal. À vrai dire, il se fichait grandement de trouver les Butterfly ou de renvoyer les humains sur la Terre.

-«Je devrai un jour entrer dans un clan, mais pour l'instant je n'ai aucun idéal.»

Puis, Mélisandre commit un geste qui eut pour effet de tout chambouler. C'était un geste très commun, mais, Damian savait que dès cet instant, tout serait changement. Elle lui effleura la joue, cette joue froide et sans vie, pourtant, il ressentit le bienfait de cette main féminine qui le touchait, sans crainte. Il leva ses yeux gris d'orage vers le visage de la jeune femme. Elle lui demanda s'il aimait tant la solitude. Il ne savait quoi répondre, en ce moment, il aimait bien la compagnie de Mélisandre.

-«Euh...Je...»

On percevait aisément le malaise derrière ses paroles.

-«D'habitude j'aime bien la solitude, mais présentement, j'aime votre compagnie.»

Puis, il mit sa propre main sur celle de la jeune femme et d'un geste fit tournoyer sa compagne pour qu'elle vienne directement s'asseoir à ses côtés...

Damian sentait à présent la délicieuse odeur de la jeune femme, elle était maintenant à ses côtés et le vampire pouvait sentir le coeur de la jeune femme battre à la chamade. Le sien aurait sans doute fait pareil, s'il en avait encore un. Il y avait aussi autre chose que le vampire ressentait. Un trouble peut-être? Non, il avait détecté une légère pointe de malaise émanant de la Hll. Il n'avait jamais prit autant d'initiatives et il savait maintenant qu'ils étaient rendus à un point de non retour. Il s'était toujours empêché d'avoir des contacts avec les autres, mais jamais il ne s'était douté que cela puisse lui faire autant de bien. Puis, le vampire sentit le malaise de la jeune femme faire place à l'attirance dont elle avait le secret. Elle lui indiqua qu'elle pensait qu'il l'aurait envoyée paître. Apparement, le geste du vampire l'avait surprise. Puis, elle le fixa, des yeux que Damian détailla de magnifiques.

-"Contrairement à ce que vous pouvez penser, je n'ai pas l'habitude de forcer ainsi la main aux inconnus que je croise. EN fait, en temps normal, je passe mon chemin et voilà tout."

Damian sourit à l'entente de ces paroles. Elle ne lui avait pas vraiment forcé la main, il y était lui aussi pour quelque chose. Puis, elle lui confia qu'il avait quelque chose qui émanait de lui et qu'elle ne pouvait pas ignorer. Damian avait des sentiments réciproques. Deux contraires pouvant former une parfaite dualité; elle avec son tempérament de feu et lui avec son calme distant. C'était d'ailleurs cette rage de vivre que Damian appréciait autant, elle lui faisait oublier le froid ambiant, lui montrant qu'il existait bel et bien de belles choses en ce monde. Et cette nuit en était une. Jouant le tout pour le tout, il passa sa main autour de la taille de la jeune médecin, se rapprochant d'elle par le fait même.

-«Vous savez, Mélisandre, personne n'est insensible à mon charme.»

Il avait dit cela en blaguant et il éclata d'un rire sincère. Puis, il reporta son regard dans celui de la Hll en lui souriant.

Damian sentit lorsque la jeune femme frissonna. Il ne savait pas si cela venait de sa froideur ou d'une sensation forte due à une émotion. Quoiqu'il en soit, il ne s'en formalisa pas. Il souhaitait changer un peu son univers et peut-être avoir un peu de plaisir en charmante compagnie. Néanmoins, il était loin d'avoir de perverses intentions envers son interlocutrice, il savait au fond de lui que ce n'était pas pour ça qu'il s'était ainsi ouvert à elle, qu'il s'était beaucoup rapproché délaissant ses inhibitions. C'était la première fois qu'il se laissait aller à un contact charnel; autrement, les souvenirs lui revenaient rapidement en tête et cela l'empêchait de poursuivre son chemin. Étrangement, cette nuit, il n'avait pas envie de pleurer ou de se laisser contrôler par sa mélancolie. Il savait néanmoins que sa tristesse reviendrait à l'assault, elle revenait toujours le hanter. C'était son karma. Mais s'il ne pouvait pas l'irradier, il devait apprendre à vivre avec.

Il ressera davantage sa main sur la taille de Mélisandre, sa paume devenant de plus en plus chaude, captant la chaleur émanant de la jeune médecin. Il se sentait plutôt bien, il se souvenait du sentiment de la joie, de l'euphorie. Puis, elle se lova doucement contre lui passant ses lèvres de façon aguicheuse sur le cou du vampire. Il se surprit à penser à toute l'ironie de la chose: d'habitude, c'était lui qui allait poser ses lèvres sur le cou de ses victimes...Il souriait intérieurement. Puis, il ressentit un sentiment trop famillier qui vint lui titiller les sens et qui eut pour effet de presque gâcher le moment présent. Elle venait tout juste de lui répliquer que personne ne résistait à son charme, qu'il reconnut ce besoin étrange: il avait besoin de sang. Puis, reportant son attention sur sa montre, il se rendit compte que cela faisait une bonne heure qu'il n'avait pas ingérer une goutte d'hémoglobine.

Il fouilla brutalement dans la poche de son manteau à la recherche d'une fiole pouvant le rassasier. Rien. Parcouru de tremblements, il regarda la jeune femme en lui lâchant un léger: «désolé...», puis, il plaqua ses mains contre son front. Il sentait son ventre s'affaisser, comme s'il eut toujours été vide, il sentait ses veines battre à ses tempes lui indiquant qu'il devait trouver une source de nourriture rapidement. Or, aucun humain n'était passé par là de la soirée et il se faisait tard... Il demanda à Mélisandre de l'attendre et contourna la rue pour se retrouver sur l'avenue. Il enjamba une poubelle renversée et cibla quelqu'un...une jeune fille armée d'un baladeur qui chantait joyeusement. Il avait horreur de s'attaquer à de si innocentes proies, mais il sentait la douleur le gagner.

S'armant de tout le sang froid dont il était capable et priant pour que Mélisandre ne l'observe pas commettre un geste aussi cruel, il surgit derrière la jeune fille et plaqua sa main sur la bouche de la jouvencelle. Elle tenta de se débattre, assénant le vampire de coups de pieds, mais dans la position où elle était, elle portait des coups plutôt innofensifs. Il ferma les yeux et planta doucement ses dents démesurées dans la chair tendre de l'adolescente. Le liquide carmin lui coula bien vite entre les lèvres: il avait si soif qu'il ne se rendit même pas compte qu'il la vidait de son sang...

[J'était inspirée...lol Et ça va rajouter du piquant...]

[Je suis de retour! ]

Les yeux du vampire s'étaient assombris, teintés d'une couleur carmin, signe que le besoin de sang s'effaçait peu à peu. Il sentait son coeur tenaillé par une force étrange que tous les vampires appellaient la Bête. Pourtant, alors qu'il vidait la pauvre adolescente de son hémoglobine, il sentait une force en lui, plus faible, mais néanmoins plus convainquante lui intimer de cesser. Puis, il entendit la voix de Mélisandre. Elle avait raison, il allait tuer la pauvre fille. Il lâcha subitement sa proie, extirpant ses crocs du cou saignant. Puis, les lèvres tachées de sang, il fixait sa victime, incapable d'intervenir auprès d'elle. Puis, à force que la raison le regagnait, ses yeux reprirent leur couleur initiale. Puis, il s'assied près de la jeune fille, une lueur de culpabilité dans les yeux.

-«Merde!»bredouilla-t-il en passa son doigt sur les deux orifices qu'il avait taillés dans la jugulaire de la jouvencelle.

Il regardait Mélisandre, un regard qui se voulait cri de désespoir. Elle était médecin, la vie de la jeune fille ne reposait que sur ses capacités. Il s'en voulait, certes, mais il se souciait également du point de vue de la Hll. Qu'allait-elle penser de lui à présent? Il avait agi comme un animal en manque de nourriture en se jetant sur une proie trop facile. Il était un lâche, et c'est dans ces cas-là qu'il maudissait son état de non-vie. De ses yeux gris s'échappa une larme qui vint rouler jusqu'à son menton pour s'écraser dans un bruit de clapotis sur l'asphalte de la rue. Il espérait vivement que la médecin intervienne, il ne pourrait supporter une autre mort futile. Il passa nerveusement sa main dans ses cheveux de neige qui avaient maintenant plus que tout des reflets d'une rouge sanguin.

[Ouais bah la flemme des vacances, quoi? ]